La COP30 s’est ouverte le 6 novembre à Belém, au cœur de l’Amazonie, dans un contexte climatique d’une gravité inédite. L’année 2024 a franchi des seuils alarmants, avec un pic momentané à +1,55 °C au-dessus des niveaux préindustriels. Dix ans après l’Accord de Paris, l’urgence n’est plus théorique.
Le ton a été donné par António Guterres : « L’heure est à la mise en œuvre, et rien d’autre ». Une déclaration qui résonne comme un ultimatum adressé aux près de 200 pays réunis pour accélérer la transition hors des énergies fossiles, réviser leurs contributions nationales pour 2026-2030 et sécuriser des financements massifs.
Dans les couloirs de Belém, une question domine : la coopération internationale peut-elle encore tenir face à un dérèglement qui s’intensifie et à des positions qui s’éloignent ?
Objectifs élevés, financements incertains : une COP sous tension
La COP30 vise à mobiliser 1.300 milliards de dollars par an d’ici 2035 pour accompagner la transition climatique. Un objectif jugé indispensable, mais encore très loin d’être atteint. Les émissions devraient chuter de 60% d’ici 2030 pour préserver la trajectoire 1,5 °C ; les engagements actuels ne permettent qu’une baisse de 10%.
Les débats ont été plombés par l’absence des États-Unis, après leur retrait de l’Accord de Paris. Une absence lourde, qui fragilise la question du financement climatique et inquiète les pays en développement.
Les négociateurs ont avancé sur les aspects techniques des nouvelles contributions nationales, mais les arbitrages politiques restent explosifs. La seconde semaine sera décisive pour rapprocher des positions encore très éloignées.
Belém, scène d’une mobilisation mondiale retrouvée
L’une des images marquantes reste la marche mondiale pour le climat du 15 novembre. Des dizaines de milliers de manifestants ont défilé dans les rues de Belém : jeunes activistes, ONG, collectifs internationaux, représentants des peuples autochtones.
Cette mobilisation a marqué un retour à une expression libre, loin des restrictions observées lors des dernières COP. Les slogans étaient directs : sortie des fossiles, protection de l’Amazonie, justice climatique, respect des droits des populations locales.
Les prises de parole, notamment celle de l’activiste autochtone Txai Surui, ont rappelé l’enjeu vital de cette COP pour les territoires les plus exposés.
Le Maroc met en avant son modèle climatique et hydrique
Le Maroc est arrivé à Belém avec une posture assumée : celle d’un pays qui veut peser. La délégation, conduite par Leila Benali, a présenté la CDN 3.0, un engagement porté à une réduction de 53% des émissions d’ici 2035, dont 22% sans condition. Une ambition saluée pour sa cohérence.
La ministre a également détaillé la nouvelle stratégie hydrique du Royaume, centrée sur la réutilisation des eaux usées traitées. Le Maroc prévoit d’en mobiliser 100 millions de m³ dès 2027 et 573 millions à l’horizon 2040.
Ces annonces ont attiré l’attention de nombreuses délégations africaines en quête de modèles reproductibles dans des contextes de stress hydrique croissant.
En marge des négociations, Leila Benali a multiplié les rencontres de haut niveau – Fonds Vert pour le Climat, FMI – afin de sécuriser des partenariats et de positionner le Maroc comme hub régional de la finance verte.
Une deuxième semaine décisive pour éviter l’impasse
Si la première semaine a permis d’avancer sur la technique, les décisions politiques restent devant. L’arrivée des ministres est attendue pour débloquer plusieurs dossiers sensibles :
-
niveau d’ambition des nouvelles contributions nationales,
-
architecture du financement climatique,
-
justice climatique et compensations,
-
barrières carbone,
-
rythme de sortie des combustibles fossiles.
Un négociateur africain résume l’ambiance : « Sans leadership, cette COP pourrait devenir une COP vide ». La présidence brésilienne devra jouer serré pour tenter de rapprocher des positions souvent antagonistes.
Un moment charnière pour le multilatéralisme
À mi-parcours, la COP30 apparaît comme un test grandeur nature de la capacité du multilatéralisme à répondre à l’urgence climatique. Les tensions sont fortes, les attentes immenses et les risques d’impasse bien réels.
Dans cette scène complexe, le Maroc cherche à faire valoir des solutions concrètes et une expérience reconnue. Reste à savoir si Belém sera la COP du passage à l’action ou une nouvelle occasion manquée.
Le verdict tombera le 21 novembre.


